Mais quelle(s) langue(s) parlaient-ils donc ?

 

Quelle langue (maternelle) parlaient Jésus de Nazareth, Cléopâtre VII, Clovis, Charlemagne, Hugues Capet, Guillaume le Conquérant, Richard Cœur de Lion, Charles Quint, Henri III d’Angleterre, Henri IV de France, Napoléon Bonaparte ou encore la mère et la femme de Louis XIV ? La réponse pourrait vous surprendre.

En prime, il sera aussi question de quelques polyglottes célèbres : Elisabeth Ière d’Angleterre, Jean-Paul II, Baruch Spinoza, Gottfried Wilhelm Leibniz, Nikola Tesla, Georges Dumézil et Thomas Pesquet.

 

Par C. R.

Publié le 19/11/2021

Dernière modification le 18/01/2024

Une inscription en allemand (l'une des quatre langues officielles de la Suisse) à l'hôtel de ville de Bâle.

 

 

Cléopâtre VII

 

Cette reine d'Égypte était d'origine grecque : elle appartenait à une dynastie macédonienne qui régnait sur le pays des pharaons suite à la conquête d'Alexandre le Grand (qui a d'ailleurs donné son nom à la ville d'Alexandrie entre autres). Il y avait d’ailleurs déjà eu plusieurs femmes nommées Cléopâtre dans la famille d’Alexandre le Grand.

Cléopâtre parlait donc logiquement le grec en premier lieu. Néanmoins, elle avait été la première reine de sa dynastie à utiliser également la langue du peuple : l'égyptien, qui est à l’origine de la langue copte actuelle (parlée par les Égyptiens chrétiens, pour simplifier). Elle parlait aussi la langue des peuples avec qui elle devait traiter : l’araméen (qui sera la langue de Jésus, trente ans après la mort de Cléopâtre), l’éthiopien, l’arabe, le mède (la langue d’un ancien peuple iranien) et sans doute l’hébreu.

Pourquoi tenait-elle à parler toutes ces langues très diverses ? Peut-être pour des raisons politiques : comme elle tenait son charme donc son pouvoir en grande partie de sa voix – que des témoins de l'époque avaient jugée bouleversante du fait de son timbre très particulier – elle s'était sans doute rendu compte qu’elle était beaucoup plus persuasive quand elle parlait elle-même la langue de ses interlocuteurs que si elle déléguait cette tâche à des interprètes.

Elisabeth Taylor incarnant la plus célèbre reine d'Égypte dans le film Cléopâtre (1963) de Joseph L. Mankiewicz. Il faut noter que le tournage du film a été presque aussi pharaonique que son sujet, avec un budget colossal, lié notamment aux milliers de figurants et aux soixante-cinq costumes de l'actrice, dont une cape tissée d'or 24 carats.


Ce polyglottisme politique sera repris notamment par Charles Quint, par Elisabeth 1ère d’Angleterre et par le pape Jean-Paul II (voir plus bas).

 

 

Jésus de Nazareth

 

Même s’il était juif, Jésus de Nazareth devait peu pratiquer l’hébreu, qui était certes la langue sacrée de son peuple mais employée surtout par l’élite sociale – tout comme le grec, qu’il a sans doute peu utilisé également.

Il n’a certainement pas parlé le latin : vu que le pouvoir romain, après avoir persécuté Jésus et les chrétiens, a tout fait pour construire une religion (catholique et apostolique) proprement romaine, il n’aurait pas manqué de mettre en avant l’usage de sa langue par Jésus si cela avait été le cas. Or l’emploi du latin n’apparaît nulle part explicitement dans les Évangiles. Quand Jésus parle avec Ponce Pilate, cela peut être par le truchement d’un interprète.

Quelle était alors la langue principale de Jésus de Nazareth ? Vraisemblablement l’araméen, une langue sémitique proche de l’arabe et de l’hébreu (par exemple, le mot pour dire « bonjour » est shlama en araméen, salam en arabe, shalom en hébreu). D'ailleurs, certains auteurs de l'époque confondaient l'araméen et l'hébreu (ils croyaient que l'araméen était de l'hébreu).

Il  existe toujours une forme moderne de l'araméen, qu'on appelle généralement syriaque de nos jours, parce qu'elle parlée dans certains villages syriens, mais par quelques dizaines de milliers de personnes seulement – alors qu’elle avait été, à un moment de l’antiquité, la langue la plus répandue du Moyen-Orient et, pendant un certain temps, la langue officielle de l’empire perse. 

Une statue de Jésus de Nazareth en Christ Salvator Mundi (une représentation symbolique du Christ sauvant le monde, avec une main qui tient un globe terrestre et l'autre qui bénit) dans la vieille ville de Mdina (les polyglottes crieront au pléonasme) sur l'île de Malte.


Ainsi, si l'on disposait d'un enregistrement de la voix de Jésus, seuls certains Syriens seraient aujourd'hui capables de comprendre ses paroles.

 

Quel est la toute première voix enregistrée de l'histoire ?

Le premier enregistrement audio de l'histoire de l'humanité a capté la voix d'Édouard-Léon Scott de Martinville (1817-1879), un typographe français qui avait inventé un procédé dix-sept ans avant le phonographe de Thomas Edison.

Il s'est en effet enregistré lui-même en chantant Au clair de la lune. On suppose, du moins, qu'il s'est enregistré lui-même pour cet essai. Cet enregistrement du 9 avril 1860 peut être écouté ici. Tendez bien l'oreille et prenez conscience que vous écoutez la voix la plus ancienne audible à ce jour.

Il faut préciser que si Scott de Martinville a su inventer une machine pour enregistrer les sons (le phonautographe, dont il a déposé le brevet en 1857 et dont le but était de remplacer la sténographie qu'il avait appris à pratiquer), il n'avait pas réussi à concevoir une machine pour lire ses enregistrements. C'est pourquoi on n'a pu les entendre que 148 ans plus tard : ce n'est qu'en 2008 qu'une équipe de chercheurs américains a trouvé un moyen pour écouter le son enregistré à l'aide d'une image.

 

 

Clovis

 

Clovis Ier, roi des Francs saliens, parlait l'ancien bas francique (une langue germanique cousine du néerlandais et du flamand) et plus précisément le francique ripuaire (c’est-à-dire des Francs situés sur les rives du Rhin, l'adjectif ripuaire venant du latin ripa, signifiant « rive »).

Clovis a été le premier souverain sur l’ancien territoire gaulois (la région celte allant de la Gascogne à la Belgique) à ne plus parler ni une langue celtique ni le latin (dont des créoles restaient parlés par le peuple, ce qui donnera des dialectes et les langues romanes qui en découleront : l'italien, le français, l'espagnol, le portugais, le roumain...).

Un timbre (gravé en taille douce par Louis Boursier)

que la Poste française a consacré à Clovis

(et à la bataille de Vouillé) en 2012.


 

En tout cas, les souverains mérovingiens parlaient  des langues germaniques. Nous allons voir que c'était aussi le cas des Carolingiens qui leur ont succédé.

 

 

Charlemagne

 

Charles Ier « le Grand » (en latin Carolus Magnus , francisé en Charlemagne) parlait quant à lui le francique rhénan (une langue germanique cousine de l’allemand).

Le fait que ces langues germaniques des Francs (mérovingiens puis carolingiens) ne se soient pas maintenues ensuite sur le territoire français suggère qu’il y avait une situation de polyglossie (on appelle polyglossie la présence de plusieurs langues parallèles dans une population donnée ; et polyglottisme, la capacité d’un individu à bien parler plusieurs langues) : si les rois et les nobles d’origine franque utilisaient des langues germaniques, le reste de la population continuait à parler majoritairement des dialectes romans (donc des créoles du latin), dont l’un d’entre eux devaient devenir plus tard le français.

Un timbre (gravé en taille douce par Louis Boursier)

que la Poste française a consacré en 2015

à Charlemagne, qui a été roi des Francs

bien avant d'être empereur d'Occident.


Si ces langues franques des mérovingiens (l'ancien bas francique) puis des carolingiens (le francique rhénan) n’ont pas pu s’implanter sur le territoire correspondant à la France actuelle, c'est probablement à cause des facteurs suivants :

  • un trop faible pourcentage de la population parlait ces langues ;
  • avec le changement de dynasties franques (donc de langue), aucune n’a bénéficié d’une période suffisante pour s'implanter en profondeur ;
  • la forte séparation des groupes sociaux (voire culturels et ethniques) n’a pas favorisé l’apprentissage des langues du groupe dominant (cour royale et noblesse) par le groupe dominé (paysans et artisans).

 

Au XVIIIe siècle, un révolutionnaire, l’abbé Sieyès, est reparti de cette situation de séparation culturelle et linguistique entre les groupes sociaux pour établir sa théorie raciale de la société française : dans Qu’est-ce que le Tiers-État, il explique que ceux qui prétendent avoir le sang bleu (donc les nobles, dont beaucoup sont issus en principe de la chevalerie franque  l'origine) constituent une « race » séparée de l’autre « race » : le « Tiers-État » – que le philologue et historien Georges Dumézil (voir tout en bas de cette page) considère plutôt comme une fonction sociale présente dans toutes les sociétés indo-européennes : ceux qui travaillent (laboratores) par opposition à ceux qui prient (oratores) et à ceux qui combattent (bellatores).

La fameuse « race impure » du chant patriotique La Marseillaise (devenu l’hymne national français) faisait sans doute référence à la noblesse française (censée descendre des Francs) émigrée (pour fuir la violence révolutionnaire) tentant de fédérer des royaumes étrangers contre les révolutionnaires français, censés descendre des Gaulois (autrement dit des Celtes habitant les quatre régions gauloises définies par Jules César dans sa Guerre des Gaules).

C’est peut-être en partie en référence à cette théorie raciale de l’abbé Sieyès (qui était un révolutionnaire) que le pape Jean-Paul II a considéré (avec un raccourci un peu expéditif qui avait peut-être pour but de répondre aux critiques habituelles sur les errances idéologiques et politiques de certains de ses prédécesseurs récents, comme le sinistre Pie IX) que la philosophie des Lumières était à l’origine du nazisme (comme quoi Jean-Paul II fonçait lui aussi tête baissée vers le point Godwin : la loi de Mike Godwin stipule que dans tout débat qui se prolonge, l'un des participants finira par rapprocher ses adversaires de Hitler ou du nazisme). Jean-Paul II était malgré tout un fin politicien et un étonnant polyglotte (voir la dernière section, en bas de cette page).

 

 


Hugues Capet

 

Contrairement aux Mérovingiens et aux Carolingiens, Hugues Capet parlait – comme son peuple – un dialecte roman : l'un de ceux qu'on regroupe sous l'appellation ancien français.

On a longtemps considéré qu'il s'agissait en l'occurrence du francien, le dialecte de l'Île-de-France. Aujourd'hui, beaucoup de philologues et de linguistes remettent en question l’idée qu’il y ait eu un dialecte roman spécifique pour l’Île de France. néanmoins, Hugues Capet parlait bien un dialecte roman (issu d'un créole du latin), qu'il s'agisse ou non de celui qui est à l'origine du français (qui reste à déterminer, entre le francien et l'anglo-normand surtout).

 

 

 

Un timbre (gravé en taille douce par Albert Decaris) que la Poste française a consacré (en 1967) à Hugues Capet (élu en 987 – ce n'était donc pas encore le millénaire).


 

L'ancien français (langue d'oïl), l'occitan (langue d'oc) et les langues italiennes (langue de si)

Ce qu’on nomme ancien français est la langue qui s’est peu à peu unifiée à partir des chefs-d’œuvre littéraires écrits dans ces diverses langues d’oïl (parlées dans un territoire correspondant à la moitié nord de la France actuelle et à une partie de la Belgique mais aussi à la cour d’Angleterre) : l’ancien normand et l’anglo-normand (utilisés par les textes médiévaux les plus célèbres : La Chanson de Roland, les versions de Thomas et Béroul de Tristan et Iseult,  les Lais de Marie de France, les romans arthuriens de Chrétien de Troyes...) mais aussi l’ancien picard (utilisé dans La Séquence de sainte Eulalie et dans les textes de Jean Bodel, Adam de la Halle, Jean Froissart...). 

Du côté des langues d’oc (parlées dans la moitié sud du territoire français actuel), l’occitan (langue composite parallèle à l’ancien français, composite également dans un premier temps) comprenait trois branches principales : le gascon, le languedocien et le provençal (dont le niçois).

Entre les deux, il faut ajouter les dialectes franco-provençaux, qui se sont développés  au centre-est de la France actuelle (Lons-le-Saunier, Macon, Lyon, Saint-Étienne, Grenoble), dans la partie francophone de la Suisse (Genève, Lausanne...) et dans le Val d’Aoste en Italie.

C’est le poète italien Dante Alighieri qui a établi (au XIIIe siècle) la distinction entre les langues d’oc, d’oïl et de si (ces dernières langues étant parlées dans les territoires correspondant à l’Italie actuelle ainsi qu’en Corse) en fonction de la manière dont on disait « oui » dans ces langues.

 

 


Guillaume le Conquérant

 

Guillaume le Conquérant, devenu Guillaume 1er d’Angleterre, suite à ses conquêtes, parlait toujours l'ancien normand, qui deviendra (à partir de cette cour royale) l'anglo-normand en intégrant peu à peu quelques mots anglais – tandis que l'anglais, de son côté, va intégrer énormément de mots français sous l'influence de l'anglo-normand : presque la moitié du vocabulaire usuel de l'anglais actuel vient ainsi de l'ancien français, l'autre moitié (et surtout la base grammaticale de la langue anglaise) étant d'origine saxonne donc germanique.

Un timbre (gravé en taille douce par Louis Boursier)

que la Poste française a consacré en 2020

au Normand Guillaume le Conquérant.


Mais le peuple anglais lui-même parlait alors des langues très diverses :

 

  • l'ancien anglais, qu'on appelle parfois l'anglo-saxon puisqu'il s'agissait d'un créole du saxon (une langue germanique venue de Saxe) parlée par les Angles,
  • des langues celtiques (surtout en périphérie)
  • et bien sûr le latin pour le clergé.

 

 

Richard Cœur de Lion

 

Ce célèbre roi d'Angleterre a d'abord parlé une langue du sud-ouest de la France, l'occitan (par sa mère Aliénor d’Aquitaine), mais aussi le français (par son père Henri II Plantagenêt, duc d’Anjou et du Maine) et enfin le latin.

 

What else ?

 

Ah ! Oui : ce célèbre roi anglais... ne parlait pas un mot d’anglais.

 

Entre parenthèses, il est toujours considéré comme admis de s'adresser à un souverain du Royaume-Uni en français. Comme Elisabeth II, Charles III parle en effet non seulement l'anglais mais aussi le français et l'allemand (la langue maternelle de son père). 

 

Quant au cri de guerre de la monarchie britannique (depuis le XVe siècle), il doit être prononcé en français également : « Dieu et mon droit ».

 

 

Un timbre (gravé en taille douce par Claude Jumelet) que la Poste française a consacré en 1999 à Richard Cœur de Lion. 


Charles Quint

 

Le roi d’Espagne devenu empereur du Saint-Empire romain germanique avait pour langue maternelle... le français, langue du duché de Bourgogne donc de l’élite flamande.

Le français était, quoi qu'il en soit, la langue de la grand-mère paternelle de Charles Quint : Marie de Bourgogne qui, en tant que duchesse de Bourgogne, régnait sur les Pays-Bas bourguignons.

Charles Quint parlait le flamand aussi, mais « un piètre flamand », se réjouit le journaliste belge francophone Michel Grodent dans un article du Soir.

 

Pièces de monnaie à l'effigie de Charles Quint (au Musée national d'archéologie de Malte).


S’il parlait donc un peu le néerlandais, Charles Quint s’était mis également à l’allemand, à l’espagnol et à l’anglais (mais plus difficilement au latin et à l’italien).

L’enjeu déterminant était bien sûr sa popularité dans les différentes parties de son empire.

 

L’idée selon laquelle Charles Quint parlait espagnol à Dieu, anglais aux commerçants (ou à ses laquais selon les versions), italien aux femmes, néerlandais ou italien aux oiseaux, français aux hommes et allemand à son cheval (ou à ses chiens ou aux militaires) relève sans doute de la blague devenue proverbiale pour illustrer son utilisation politique des langues. Cela illustre aussi le caractère stéréotypé des représentations passées (parfois toujours tenaces) des langues et des nations.

 

 


Henri III d'Angleterre, Henri IV d'Angleterre et Henri IV de France

 

Henri III d'Angleterre parlait... français.

 

Henri IV d'Angleterre a au contraire été le premier roi d'Angleterre à parler anglais.

 

Henri III de france a toujours parlé français.

 

Henri IV de France a parlé... l'anglais avant le français (avec un accent béarnais qui choquait à Paris).

 

 

La mère et la femme de Louis XIV

 

L'épouse du roi de France Louis XIII (et la mère de Louis XIV) était d'Anne d'Autriche (1601-1666). Cependant, ce n'était ni l'allemand ni le français qu'elle parlait dans son enfance mais l'espagnol – comme son nom ne l'indique pas – puisqu'elle était avant tout l'infante d'Espagne, autrement dit la fille (aînée) du roi d'Espagne (Philippe III).

 

De même, sa belle-fille – donc la femme de Louis XIV – Marie-Thérèse d'Autriche (1638-1683) était également la fille du roi d'Espagne (Philippe IV) et a donc parlé d'abord espagnol.

 

Louis XIV et l'Espagne

C'est précisément parce qu'il était à la fois le fils et le mari d'une infante d'Espagne que Louis XIV a considéré qu'il avait un droit sur la succession d'Espagne et qu'il a envoyé l'un de ses petits-fils en Espagne pour y devenir roi (sous le nom de Philippe V, qui a été le premier Bourbon roi d'Espagne, après la dynastie des Habsbourg). L'actuelle famille royale espagnole a donc bien Louis XIV comme ancêtre.

 

 

Napoléon Bonaparte

 

La langue maternelle de Napoléon Bonaparte (autrement dit la langue parlée par sa mère avec lui) devait être un dialecte italien (une langue de si, d'après la classification de Dante) : soit le génois, soit le corse.

Le français a donc été sa deuxième langue, apprise à l'école à partir de neuf ans. S'il parlait cette langue à peu près correctement (mais avec des italianismes et un fort accent corse), il n'en a cependant jamais vraiment maîtrisé l'orthographe... Il écrivait par exemple autorisé ainsi : « otorizé ».

 

 

Napoléon Bonaparte s'éveillant à l'immortalité par François Rude (détail d'un surmoulage, musée Rude, Dijon).


Giuseppe Garibaldi

 

Le héros de l'unité italienne étant d'origine niçoise (il a même été député de Nice), il en parlait logiquement le dialecte, qui appartenait à l'ensemble occitan (on peut remarquer d'ailleurs que le nom de la famille princière monégasque, Grimaldi, se termine comme Garibaldi).

 

Garibaldi parlait aussi le français.

 

L'italien n'était que sa troisième langue, ce qui peut sembler étonnant pour celui qui sera considéré comme l'un des pères de la patrie italienne – avec  Camillo Cavour, Giuseppe Mazzini et, bien sûr, Victor-Emmanuel II, premier roi d'Italie (qui a conservé le numéro qu'il avait en tant que roi de Piémont-Sardaigne par attachement à ses origines piémontaises).

 

 

Un timbre de la Poste hongroise représentant Giuseppe Garibaldi pour le centenaire de l'Expédition des Mille (la conquête du royaume des Deux-Siciles en 1860). 


Guillaume Apollinaire

 

Guillaume Apollinaire (poète de la modernité tout comme le Suisse Blaise Cendrars) a immortalisé les constructions les plus modernes de Paris (notamment le pont Mirabeau – dont il a fait un célèbre poème – et la tour Eiffel – dont il a fait un calligramme).

Pourtant, il était né à Rome d’une mère issue de la petite noblesse polonaise. C'est pourquoi il a d'abord parlé le polonais et l’italien.

Le français a donc été sa troisième langue, ce qui ne l’a bien sûr pas empêché d’en être un grand poète.

Il faut noter que son pseudonyme est constitué de son premier prénom et du cinquième. Il s’appelait en effet Guillaume Albert Vladimir Alexandre Apollinaire de Kostrowitzky.

 

 

 


Jack Kerouac

 

La langue maternelle de Jack Kerouac, auteur de Sur la route, était le joual : une variété du français parlée par une partie de la population du Québec, en parallèle d'un français plus standard.

Ses parents étaient en effet québécois. Son père, Léo-Alcide Kéroack, était issu d’une famille d’origine bretonne. Sa mère, Gabrielle-Ange Lévesque, était de la même famille que l'ancien premier ministre canadien René Lévesque.

Jean-Louis Kérouac (son nom de naissance) a appris l’anglais à l’école dans un second temps.

Ce n’est que plus tard qu’il a pris le pseudonyme anglicisé Jack Kerouac.

 

 


Quelques polyglottes célèbres

 

Nous avons déjà évoqué le cas de Cléopâtre VII mais une autre reine s'est également appuyée sur sa maîtrise de nombreuses langues pour asseoir son pouvoir...

 

Elisabeth Ière d’Angleterre, couronnée en 1559, avait une lourde tâche : unifier un royaume on l'on parlait diverses langues. Elle a en effet maîtrisé un nombre incroyable de langues pour favoriser sa diplomatie :

  • la langue principale de son pays (l'anglais),
  • les langues celtiques qu'on y parlait aussi (cornique, scot, irlandais, gallois – ce qui lui a permis d’asseoir son pouvoir sur un territoire multiculturel),
  • des langues anciennes (grec et latin),
  • des langues romanes (espagnol, français, italien),
  • des langues germaniques (allemand et flamand).

Pour la petite histoire, ses incroyables connaissances ont fait courir le bruit qu’elle était un homme – car comment une femme aurait-elle pu être si savante, dans la vision de l’époque ? On a dit aussi qu’elle avait appris toutes ces langues sur l’oreiller, du fait d’un grand nombre d’amants – malgré son surnom de « reine vierge » (car les commérages ne se soucient jamais de la cohérence).

 

 

Tout comme ces reines, le pape Jean-Paul II a fait un atout politique et diplomatique de la maîtrise de nombreuses langues : le polonais, le latin et l'italien bien sûr, mais aussi l'espagnol, l'anglais, l'allemand, le français, le russe, l'ukrainien, le croate et le tchèque. Dans son homélie du 22 octobre 1978 (six jours après son élection), Jean-Paul II a utilisé onze langues différentes. La dimension politique de ce choix est suggérée par le fait que c'est dans cette homélie qu'il a prononcé le célèbre « N'ayez pas peur », formule qu'il reprendra quelques mois plus tard en Pologne (en 1979). Ce sont en effet ses discours dans son pays natal qui ont contribué à ébranler le bloc communiste dans les années 80, comme une réponse à l'ironie de Joseph Staline, qui avait demandé : « Le Vatican, combien de divisions ? » Le dictateur russe ne se doutait pas que le plus petit État du monde contribuerait un jour à déstabiliser le plus grand.

L'ancien pape Jean-Paul II sur un timbre de la poste vaticane célébrant son voyage apostolique de 2003 en Croatie (l'un des nombreux pays dont il maîtrisait la langue).


 

Il faut citer également deux philosophes, un scientifique et un spationaute.

 

Baruch Spinoza maîtrisait non seulement le portugais mais aussi l'hébreu, l'araméen (la langue de Jésus de Nazareth, comme nous l'avons vu), l'espagnol, le néerlandais et le latin.

 

Gottfried Wilhelm Leibniz écrivait en allemand mais aussi en français et en latin. Il maîtrisait également l'italien, l'anglais, le néerlandais et l'hébreu. Il savait même lire un peu le russe et le chinois, d’où sa découverte sur d’anciens documents chinois d’un système algébrique qui préfigure les octets de l’informatique...

 

Le non moins génial et mystérieux Nikola Tesla maîtrisait le serbo-croate, le tchèque, l'anglais, le français, l'allemand, le hongrois, l'italien et le latin.

 

Le spationaute Thomas Pesquet, outre sa langue maternelle, le français, doit maîtriser l'anglais et le russe pour ses missions et ses entraînements. Il parle également l'allemand, l'espagnol et le chinois.

 

Un cas à part, pour terminer : le philologue et historien des mentalités Georges Dumézil. Il se débrouillait en effet avec... deux-cents langues, dit-on. Surtout des langues anciennes : c’est ce qui lui a permis d’élaborer ses fameuses théories sur l’unité des langues (donc des civilisations ou des mentalités) indo-européennes (de l'Inde à l'Europe de l'ouest), mais aussi sur la trifonctionnalité (l'organisation de ces sociétés indo-européennes et de leurs univers mythologiques en trois grandes fonctions : ceux qui combattent, ceux qui prient et ceux qui travaillent).

 

 

 

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